Au-delà de leur sujet propre, tous les textes réunis dans ce livre posent, avec anxiété, la question de l'avenir de la monarchie. Horrifié par les secousses du «kaléidoscope social», persuadé que la tradition prime le droit fondé sur la raison, nostalgique d'un ancien monde à demi fabuleux, Saint-Simon choisit le révolu contre les révolutions. Et quand il se heurte au temps et aux réalités, il lui reste la dimension de la négativité et de la subversion. Son mépris de ce qui passe (le «néant du monde») paraît-il mal accordé à son amour (ou à sa rage) des grandeurs temporelles ? «Dans un baiser de pair, il sent le souffle de l'infini», écrit Yves Coirault : tout signe s'inscrit dans l'orbe d'un mythe plus ou moins transhistorique censé gouverner l'histoire. Il nous est facile, à nous qui savons que la monarchie ne survécut pas quarante ans à Saint-Simon, de parler de la vanité de ses luttes.
Le moins inutile des combats que ce livre met en lumière aura été celui du style, de cette écriture qui étonna la langue française. Ce qu'on propose ici, c'est un raccourci d'univers dont la première vertu serait de rendre moins impalpable le génie de la création.