«Pour la première fois en France, la Pléiade réunit en un volume toutes les œuvres littéraires et théâtrales de Gogol et, parmi le reste de ses écrits, tout ce qui est essentiel pour suivre ou illustrer l'évolution si singulière de l'auteur – de la satire à l'apostolat et du rire au "mysticisme" – et pour en mettre en évidence la continuité, sans recourir nécessairement ou uniquement à des interprétations pathologiques, apocalyptiques ou gratuitement psychanalytiques.
Gogol, en tant que père de la nouvelle, du roman et du théâtre russes tels qu'ils se sont imposés après lui dans la littérature universelle, est assez bien connu par de nombreuses traductions (entre
lesquelles on n'a eu que la peine de choisir quand on n'a pas eu recours, notamment pour le cycle ukrainien, à des traductions nouvelles). Le Gogol seconde manière, celui du "grand dessein", avec ses ambitions religieuses de réformateur moral de son pays, est beaucoup moins connu : ce sont des traductions inédites que celles des Passages choisis de ma correspondance et de la Confession d'un auteur par José Johannet.
Entre ces deux Gogol de style si différent, il y a une profonde mais émouvante unité : c'est elle qui ressort, d'une étape à l'autre, de la composition chronologique et progressive de ce volume. Pour l'illustrer, on s'est référé avant tout au témoignage de l'auteur lui-même dans ses lettres privées, accessoirement au témoignage de ses contemporains, par d'abondantes citations pour lesquelles ont été, à dessein, largement développées la Chronologie et les Notes. C'est ainsi un portrait global et mobile de l'homme et de son œuvre – rigoureusement inséparables dans son cas, ou plutôt de plus en plus étroitement liés jusqu'au drame final qui les sépare, – une véritable somme du phénomène Gogol, qu'offre ce volume.»
Michel Aucouturier, 1966.