Ce volume d'œuvres, qui n'appartiennent pas à la fiction, présente un Giono inhabituel, se débattant avec le quotidien : deux journaux, un voyage en Italie et un autre en Espagne, le récit minutieux de l'affaire Dominici et celui de la bataille de Pavie. Ces successions de faits, de données précises à dépouiller et à analyser froidement, auraient pu brider, voire brimer, un romancier. Le réel écrase, mais Giono s'en débrouille, quitte à l'arranger parfois à sa convenance. L'homme de Manosque va s'incorporer mentalement et physiquement à son récit : «Je me suis efforcé de décrire le monde, non pas comme il est, mais comme il est quand je m'y ajoute, ce qui évidemment ne le simplifie pas». Ailleurs, il avouera plus banalement cette conception romantique selon laquelle «quoi qu'on fasse, c'est toujours le portrait de l'artiste par lui-même que l'on fait». Aussi ne sommes-nous pas surpris de découvrir que Giono n'a que rarement utilisé le journal comme véhicule de son art, son œuvre - romanesque ou non - étant toute entière empreinte de sa vie. Ce volume nous est d'autant plus précieux qu'une seule fois, mû par le «besoin d'une sérieuse discipline de l'esprit et du corps», Giono se sera livré à la rédaction d'une chronique personnelle, spontanée, parfois impulsive, - un Journal de l'occupation d'un Giono que nous ne connaissions pas.